En cette période de grand froid, nous subissons tous les assauts du vent glacial qui nous transissent tandis que nous traversons les rues à pas pressés. Mais cette situation, aussi désagréable soit-elle, n’est que peu de choses comparée à ce que vivent quotidiennement les personnes sans domicile fixe. Ces SDF, devant qui nous passons quotidiennement, et qui sont les premières victimes des baisses – drastiques – des températures.
C’est au moment des fortes chutes de neige du début du mois de février que j’ai rencontré Yohan, jeune homme de 29 ans et sans domicile fixe depuis plusieurs mois. Mais plutôt que de vivre dans la rue, Yohan a choisi d’installer sa tente sur les voies de la Petite Ceinture de Paris, non loin du parc des Buttes Chaumont. C’est là que j’ai fait sa connaissance, alors que je parcourais les voies abandonnées de la Petite Ceinture alors recouvertes d’une couche de poudreuse.
Pourquoi la Petite Ceinture ?
La Petite Ceinture de Paris, dont les voies n’ont pas vu de train régulier depuis 1993, possède l’avantage de présenter un certain nombre de tunnels. Ainsi, les personnes y vivant sont-elles (relativement) à l’abri des intempéries. En outre, les voies de la PC sont en retrait par rapport à la voirie, permettant à ses « résidents » de ne pas être directement dans la rue. Cependant, lesdits tunnels sont ouverts aux quatre vents et deviennent glaciaux dès que le mercure approche zéro. Aussi la Petite Ceinture ne peut-elle offrir qu’un abri très précaire aux sans domicile fixe.
Des conditions de vie précaires
Yohan m’a également fait part des difficultés liées au manque d’hygiène, de sanitaires, auxquels sont confrontés de très nombreuses personnes vivant à la rue. Pas de douche, pas de toilettes, la crasse des voies de chemin de fer… Les conditions de vie sur la Petite Ceinture sont particulièrement rudes, me confiait Yohan. Au-delà, la solitude, le manque d’interactions avec les autres personnes sont autant d’éléments aggravant la situation des personnes SDF.
Ainsi Yohan a-t-il été touché quand je lui ai proposé de le prendre en photo ; alors que beaucoup d’entre nous réalisons des selfies, peu sont ceux à poser un regard (photographique) sur les personnes de la rue.
SDF et promeneurs sur la Petite Ceinture
De plus en plus de personnes se rendent sur la Petite Ceinture de Paris. Beaucoup y viennent pour son côté « à part », pour être au calme. Nombreux sont ceux à y prendre des photos. Aussi Yohan rencontre-t-il souvent ces promeneurs ; sortant des Buttes Chaumont par la voie ferrée, ils se dirigent vers l’emplacement de l’ancienne gare de Belleville-Villette. Certains d’entre eux, me disait Yohan, lui offrent une cigarette, une pièce de monnaie, parfois de quoi manger. Mais il me confiait qu’au-delà de la nourriture, il manque également de vêtements, de chaussures… Ainsi que d’objets en apparence banals, telle une serviette de toilette.
En tant que promeneur et photographe habitué de la Petite Ceinture, la situation de Yohan m’a marqué. Parler de sa situation, de son quotidien, m’a permis de prendre davantage conscience de cette autre face de la PC. Au cours de mes précédentes promenades, j’avais déjà remarqué la présence de quelques tentes sur la PC. Mais le plus souvent, j’étais passé à côté d’elles, parfois en offrant une pièce… mais sans prendre le temps de dialoguer avec les personnes y habitant.
Car la Petite Ceinture, ce n’est pas seulement un patrimoine urbain, architectural ferroviaire… c’est aussi la réalité quotidienne de personnes, comme Yohan, qui y ont posé leur tente dans l’attente de jours meilleurs.
Un manque flagrant de places d’hébergement
Yohan m’a également fait part du manque criant de places dans les centres d’hébergement. « Il y a quelques mois, un nouveau centre a ouvert », me disait-il. « Mais il ne peut accueillir qu’une centaine de personnes environ ». La saturation de ces centres pose effectivement un grave problème ; cependant, certaines personnes préfèrent ne pas s’y rendre, craignant pour leur sécurité.
Aussi, nous ne pouvons que saluer le travail d’associations telles la Fondation Abbé Pierre, les Petits frères des Pauvres, ou encore le Secours populaire : elles œuvrent chaque jour à rendre un peu de dignité aux personnes de la rue.
Merci pour cet intéressant article. Au passage, parmi les associations oeuvrant pour les sans-abris, il y a aussi l’Armée du Salut. 😉
Petite question : quand exactement, as-tu parlé avec Yohan ? L’as-tu revu depuis, et peux-tu donner de ses nouvelles ?
Amitiés.
Hello Christiane, merci pour ton commentaire !
J’ai parlé avec Yohan début février ; je ne l’ai malheureusement pas recroisé, n’étant pas retourné sur la Petite Ceinture dans le 19e… Mais tu as raison : il faudra que je retourne prendre de ses nouvelles !
Amitiés
JN